Comme promis voici mon analyse du jeu Labyrinth.
Il n'y a que la première partie, la suite la semaine prochaine.
Bonne lecture...
Après une partie en face à face, une autre en cours et une autre par Vassal également en cours, je vous livre ici mes premières impressions concernant ce jeu.
Le thème : celui-ci est très bien traité par le concepteur, les informations contenues dans les cartes concernant notamment les mouvements jihadistes sont très pertinentes et se basent sur des réalités. Les événements US et neutre sont aussi très réalistes. Le concepteur est très bien renseigné ! On ne peut qu’être admiratif sur le travail de conception de ce jeu avec toutes ces implications. Certes, il s’agit d’un jeu US fait par un Américain avec sa vision du monde. Néanmoins, je trouve que le traitement de cet affrontement actuel est géré de manière plutôt honnête et les deux camps ont véritablement les moyens de gagner à parts égales. Ce jeu porte très bien son nom, nous verrons pourquoi par la suite.
Le matériel : comme souvent avec GMT, le matériel est d’excellente facture, tant la carte, les cartes à jouer, les pions et les cubes en bois. Les règles sont en couleurs et très bien imprimées. Non vraiment c’est du très bon matériel qui se rapproche du jeu de plateau. Je suis juste surpris et déçu d’avoir appris avec ce jeu qu’il est imprimé en Chine. On va se faire bouffer ! Mais là n’est pas le sujet.
Les règles : elles sont claires et assez courtes (10 pages) mais nécessitent d’être parcourus plusieurs fois pour bien comprendre tous les mécanismes et toutes les implications qui en découlent. Le playbook présente un exemple de jeu très bien fait et indispensable pour comprendre définitivement le fonctionnement du jeu.
Le fonctionnement : ce jeu est un CDG qui présente deux particularités majeures. La première c’est que chaque joueur joue deux cartes à la suite avant que l’adversaire ne joue son tour. Cela permet donc de préparer une action en jouant une première carte pour préparer la seconde en établissant les conditions favorables à la réalisation de la deuxième. La deuxième, comme Twilight Struggle, une carte dont l’événement est du camp adverse, voit cet événement se déclencher quand l’autre joueur la joue. Il y a toutefois une astuce dans chaque camp pour ne pas déclencher un événement qui serait trop dangereux.
Ces cartes peuvent être jouées de deux façons, soit pour les points d’opérations, soit pour les événements. Les joueurs reçoivent entre 7 et 9 cartes en fonction, pour l’US du nombre de troupes déployées, pour le jihadist, du montant de ses finances. Chacun joue donc 2 cartes, c’est toujours le jihadist qui commence, puis on résoud les attentats éventuels, et ainsi de suite jusqu’à ce que chaque joueur ait utilisé toutes ces cartes. Le jeu se termine quand il n’y a plus de cartes dans la pioche. On peut faire varier la longueur du jeu en jouant 1, 2 ou 3 fois la pioche.
La gouvernance : pour chaque pays musulman, un marqueur reflète la gouvernance et c’est en améliorant celle-ci dans le plus de pays que le joueur US peut gagner et c’est en le dégradant que le joueur jihadiste peut gagner. Un pays peut avoir soit une Bonne, Moyenne, Pauvre gouvernance ou loi islamique. De plus il peut être, par rapport aux USA, Allié, Neutre ou Adversaire.
Hard et soft power : le reste du monde, n’est pas concerné par la gouvernance car elle ne peut pas évoluer. En revanche les pays sont soit partisans du hard power ou du soft power. Si la différence entre les pays hard et soft est la même que la posture des USA, le joueur US n’a pas de pénalité. En revanche, si cette différence n’est pas la même, le joueur Américain a une pénalité. Par exemple, vous avez 2 pays Hard et 3 pays soft, cela fait +1 pays soft ; si les USA sont soft, pas de soucis, s’ils sont hard ils ont une pénalité.
Le prestige US : le joueur US a une échelle de prestige qui lui donne un bonus, un malus ou rien en fonction de son niveau. En fonction de certaines actions de l’un ou l’autre joueur, celui-ci évolue. Cela sert à mener la guerre des idées.
Les actions US : que peut donc faire le joueur US avec ses points d’opérations ? Premièrement, le niveau de gouvernance est associé à un coût en point d’opérations. Good vaut 1, Fair vaut 2 et Poor vaut 3. Par conséquent le joueur US doit jouer une carte égale ou supérieure en points d’opération à la gouvernance du pays visé. En clair, dans un pays à pauvre gouvernance, seules les cartes de 3 points peuvent être utilisées. Toutefois, si le joueur n’a pas ou plus de cartes de 3 il peut dépenser 1 ou 2 points d’opérations pour constituer des réserves puis, avec la carte suivante compléter pour avoir 3 points.
Deuxièmement, voici les différents types d’action possibles et leurs implications :
- guerre des idées : il s’agit ici d’améliorer la gouvernance des pays musulmans vers Good. Cela peut se produire dans un pays allié ou neutre qui n’est pas sous la loi islamique. Cela se résout avec un dé modifié par le prestige, la différence de posture entre le monde et les USA, un voisin qui est déjà Good et quelques autres facteurs. En réussissant, vous augmentez d’un cran l’alignement (de neutre à allié) ou la gouvernance d’un pays allié (poor à fair, fair à good). C’est une condition essentielle pour gagner d’améliorer la gouvernance du plus grand nombre de pays possible.
Pour les pays non-musulmans vous pouvez faire aussi une guerre des idées pour faire basculer un pays de soft à hard power et inversement.
- démantèlement (disrupt) : c’est une opération consistant à enlever des cellules jihadistes actives ou à activer des cellules dormantes pour les éliminer par la suite. En fonction du pays vous en enlever une ou deux et si vous avez des troupes US vous gagnez un point de prestige.
- lutte contre les attentats (block) : avec 3 points d’opérations vous pouvez bloquer un attentat et donc enlever le marqueur correspondant, et donc contrecarrer les plans de votre adversaire.
- déploiement de troupes : vous pouvez envoyer des troupes dans un pays musulman allié ou les rapatrier aux States.
- changement de régime : il s’agit ici d’un déploiement spécial consistant à intervenir dans un pays sous la loi islamique pour l’aider à retrouver une good gouvernance (ce qui se passe en Afghanistan actuellement). C’est lourd car vous devez envoyer 6 troupes (sur 15) et elles sont bloquées jusqu’à ce que vous ayez réussi à mettre une good gouvernance dans ce pays ce qui peut prendre du temps car le jihadist ne va pas se laisser faire. De plus les USA doivent être hard power. Je trouve cette règle particulièrement réaliste car vous devez faire un déploiement de ce genre avec prudence sachant que ça va prendre du temps comme dans la réalité ! Je rappelle que plus vous déployez de troupes dans le monde moins vous avez de cartes à votre tour, ce n’est donc pas une décision à prendre à la légère. A mon avis, pour que cela soit rentable il faut viser un pays riche en ressources. En effet, chaque pays à entre 1 et 3 points de ressources représentant sa richesse. Par exemple l’Afghanistan a 1 point et les Etats du Golfe Persique ont 3 points. Ce sont en plus des pays pétroliers ce qui donne un avantage car il y a deux cartes « pics pétroliers » qui augmentent de 1 les ressources des pays pétroliers que vous contrôlez. Comme une des conditions de victoires consistent à avoir 12 ressources sous good gouvernance, vous comprenez tout de suite qu’il vaut mieux viser des pays riches que des pays pauvres.
- retrait : vous pouvez vous retirer d’un pays en changement de régime mais pour cela les USA doivent être soft power. Or on ne change pas comme ça de posture et c’est loin d’être gratuit comme évoqué ci-dessous.
- changement de posture : vous pouvez passer de hard à soft et inversement mais c’est très cher car cela vous coûte deux cartes à 3 points d’opérations chacune à jouer pendant votre phase d’action. C’est rentable quand le reste du monde est complètement opposé à vous (en effet cela peut entraîner jusqu’à -3 au dé pour la guerre des idées), dans ces conditions ce n’est même pas la peine donc autant changer. C’est aussi valable dans le sens où pour aller effectuer un changement dans pays sous la loi islamique il faut être hard tandis que pour se retirer d’un pays où on a des troupes et où on n’arrive pas à augmenter sa gouvernance jusqu’à good il faut être soft. En clair, cela s’appelle partir la queue entre les jambes…
La suite au prochain numéro