Charles Antoine a écrit:
"En fait de Talibans, le film écorne aussi un tantinet - et plus directement - l'image du christianisme des origines."
le film n'écorne pas AUSSI l'image du christianisme mais UNIQUEMENT, ce qui est un peu différent
Ben on n'a pas dû voir le même film alors.
Charles Antoine a écrit:
J'ai toujours du mal à comprendre la volonté de l'auteur. Dénoncer les talibans d'aujourd'hui en s'attaquant aux chrétiens d'hier ... je ne pige toujours pas le sens de la démarche intellectuelle.
Une démarche de ce type a été pratiquée par énormément d'auteurs de pièces de théâtre ou de films. Elle consiste, pour des raisons très variables, à transposer dans un autre contexte le message que l'on veut faire passer, en estimant (et en faisant les allusions qu'il faut pour) que le public comprendra ce second degré.
Par exemple, Voltaire dans sa pièce "Mahomet le prophète" dénonce en fait l'Eglise catholique. Le public de l'époque (clergé compris) l'a très bien compris.
Eisenstein, dans Ivan le Terrible, dresse un parallèle avec Staline (qui d'ailleurs n'appréciera pas la 2ème partie).
Giraudoux, dans "la Guerre de Troie n'aura pas lieu", écrit en 1935, ne parle en fait pas vraiment de la guerre de Troie.
J'espère que ces quelques exemples t'aideront à comprendre.
Même si, en l'occurrence, Amenabar vise bien aussi l'extrémisme chrétien et "tous les extrémismes religieux" (une formule qui a le don de m'agacer mais c'est bien ce qu'il dit).
Pour ceux (nombreux ici) qui ne voient dans le film qu'un projet disons 'idéologique', je comprends qu'il soit difficile de saisir la démarche et surtout, pourquoi ça tombe sur ce pauvre évêque Cyrille qui n'avait pas fait parler de lui depuis un bout de temps. Si le film se réduisait à une volonté de dénoncer les extrémismes religieux, le choix de la période et du thème serait effectivement arbitraire (comme le choix de Mahomet par Voltaire).
Mais en réalité le film ne se limite pas à ça. Cet aspect est même en fait secondaire. Il se trouve qu'Amenabar a voulu faire un film sur l'astronomie (c'est évident quand on a vu le film. Mais même ceux qui se contentent des interviews devraient le savoir :
http://www.ecranlarge.com/article-details-14109.php http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne-24989/interviews/?cmedia=18944481 ), sur les liens entre science et religion, tout en étant un péplum avec aussi une histoire d'amour et de pouvoir, bref... le film qu'il a fait.
Et il y a mis aussi, mais pas seulement, sa dénonciation de l'extrémisme religieux.
Après, on peut effectivement trouver qu'il est plus "confortable" aujourd'hui de s'en prendre aux chrétiens du IVème siècle qu'aux extrémistes musulmans d'aujourd'hui.
On peut aussi comprendre que des artistes ou intellectuels n'aient pas spécialement envie de devenir la cible d'une fatwa et de voir ainsi leur vie détruite par la peur, les contraintes de sécurité ou l'arme d'un illuminé. Cette menace n'a rien de théorique. J'ai une admiration sans borne pour ceux qui sont prêts à la braver, mais ce n'est certainement pas moi, internaute installé dans un confortable anonymat, qui irai taxer les autres de manque de courage.