l'appat du gain et des riches provinces de Syrie.
Je parle de la première croisade, et les historiens sont d'accord là-dessus : la motivation spirituelle prime sur tous le reste pour cette croisade. Les chevaliers barons vendent leurs biens pour répondre à l'appel du Pape et effectuer leur mission, dans une très grande ferveur. Il pensent tous rentrer chez eux après avoir accompli leur mission, ils ne songent pas à "coloniser" la Syrie (ni le Liban
) (ils prêtent d'ailleurs serments à l'empereur Byzantin). Godefroy de Bouillon refuse le titre de roi, car il n'y a qu'un roi, le Christ. Son successeur n'aura pas ce scrupule.
Le premier tournant, comme je le signale en haut de page 5 de mes notes historiques, se déroule pendant le siège d'Antioche. L'aide promise par Alexis ne vient pas. Certains chefs Croisés découvre à la fois qu'ils sont livrés à eux même, et découvrent en même temps la richesse des lieux. C'est à cet instant, comme indiqué, que les motivations de départ commencent à être infléchies. Baudoin de Boulogne ou Bohémond pense désormais à joueur leurs propres cartes. Mais quand il faut repartir vers Jérsusalem, tout le moindre répond néanmoins à l'appel, les divisions s'efface derrière la motivation première.
L'aspect "reconquête" (ie contre-offensive, après une invasion initiale par les musulmans) est surtout valable du point de vue byzantin, comme il l'est pour les chrétiens en Espagne. Les Croisés de la première croisade, sont utilisés pour cette reconquête qui n'est pas directement leur motivation.
Pour comprendre les motivations des chevaliers de la première croisade, le mieux c'est de lire les témoignages d'époque, notamment la "chronique anonyme de la première croisade".
Tu notera que j'ai étayé tous mes propos de références aux ouvrages sur le sujet. Ils n'y sont pas tous, car je ne peux tout lire. Stephen Neuville, mon traducteur, qui m'a éclairé sur les positions de sauteurs anglo-saxons, m'a en tout cas conforté dans les positions avancées das mes notes.
"L'appât du gain" comme tu le dis n'est donc pour moi absolument pas la motivation principale de la première croisade. On la lui colle sur le dos pour mieux la critiquer, ce qui est avouons le plutôt dans l'air du temps.
Comme celle-ci rassemble plusieurs milliers d'hommes, il est néanmoins certain que parmi eux il y en a pour qui cet argument a du compter (ce ne sont que des hommes). Mais ce n'est pas la motivation fondatrice de cette expédition. Au regard des risques encouru pendant l'expédition et ceux de laisser son domaine sans défense en occident, "l'investissement" semble d'ailleurs très peu rentable. C'est un véritable saut vers l'inconnu que cette première croisade.
Le gain apparaîtra plus tard comme objectif et culminera avec la 4e croisade qui perdra son âme dans la conquête de Constantinople. Ce appât du gain, lorsqu'il apparaîtra, ne sera d'ailleurs jamais la seule motivation. Les deux croisades lancées par Saint-Louis sont à la base très désintéressées, Saint-Louis n'y va pas pour faire fortune mais par sens du devoir, en tant que roi Très Chrétien.
A noter enfin, que même lorsqu'il y aura un Roi de Jérusalem, il sera distinct du patriarche latin de Jérusalem. Il y a séparation des pouvoirs politiques et religieux, alors que dans le camp adverse, le calife, par "essence" cumule tous ces pouvoirs de chef religieux, militaire et politique.
J'ai en tout cas essayé dans ces notes d'être le plus factuel possible et de bien appuyé mes propos sur les travaux gigantesques de grands historiens (notamment Grousset, qui reste le grand maître sur le sujet, bien que beaucoup ne le jugent pas assez "moderne"). J'ai aussi exprimé mon sentiment profond, la façon dont j'ai compris les choses en lisant des milliers et des milliers de pages sur le sujet (qu'il faut ensuite restituer en 6 pages...). ce qui résume le mieux ma position, c'est en fait la phrase de Jacques heers que j'ai cité :
« ces grandes aventures vers l'Orient, ces "gestes des Francs", celles des premiers temps surtout, ne peuvent, pour l'historien, comme pour l'homme d'aujourd'hui, s'approcher et s'analyser qu'au prix évidemment d'un grand élan de compréhension. Mais n'est-ce pas le cas de toute approche historique ? Il n'est pas d'histoire, pas d'évocation sereine et noble du passé, sans accepter le dépaysement, sans véritable sympathie »Sans sympathie pour nos ancêtres (qu'ils soient croisés, grognards ou poilus...), comment écrire leur histoire.... Moi je suis là pour ça, leur témoigner ma compréhension.
Merci de ton retour en tout cas Eric.
:croisade: