J’ai vu ces deux films ce week end, que l’on peut qualifier de chefs d’œuvre, l’un comme l’autre ayant l’ambition de porter un message « fort ».
J’avais déjà visionné le premier sur Arte il y a assez longtemps.
Les sentiers de la gloire et un film qui est une véritable réussite et qui n’a pas pris une ride.
Rappelons qu’il fut longtemps censuré pour cause d’atteinte à l’honorabilité de l’armée française.
Mais le film vaut pour bien plus qu’une simple charge anti armée française de 14-18. C’est en définitive un film profondément humaniste, très psychologique et un soupçon sociologique. Il a une forme de portée universelle en ce sens qu’il entend dénoncer la vanité humaine, et l’orgueil, qui confinent parfois (souvent ?) à la bêtise, voire à la cruauté.
Il y a trois scènes dans le film que je qualifierais de déterminantes :
-La première c’est au tout début du film : une discussion entre deux généraux, pour simplifier nous appellerons le premier le général A, qui est un général de division couvert de cicatrices (on imagine qu’il ne se les ai pas faites dans un bureau). Le général B qui devise avec lui, qui est probablement un général de corps d’armée, lui explique qu’il a été décidé au niveau du grand état major, (et au niveau politique) de s’emparer de la fameuse côte 110, qui est un point stratégique dans le dispositif allemand. Il lui dit qu’il a pensé à son unité pour effectuer cette mission périlleuse.
La réaction, logique pour un soldat digne de ce nom, du général A, est de refuser tout net, au motif que ses hommes sont épuisés et surtout que l’objectif lui semble inatteignable.
Jusque là, rien que de très classique, nous avons d’un côté une volonté politique d’affichage d’un résultat donné, et de l’autre côté un refus catégorique d’un subalterne, certes titré, d’y accéder, au nom du bon sens.
Mais le général B, en fin politique, lui fait alors comprendre qu’il pense à lui pour une certaine promotion élogieuse, et qu’il est navré qu’il décline ainsi la proposition. Ce à quoi le général A répond, après une très brève hésitation, que l’objectif, bien qu’ardu, n’est pas totalement irréalisable...
C’est là le premier tournant du film, dès le début.
Le décor est planté : des troupes usées vont devoir s’emparer d’une position retranchée, ultra défendue, avec une incertitude en termes de garantie de renforts et de préparation d’artillerie.
Je résume la suite : Le colonel Dax (joué par K. Douglas) envoie ses hommes à l’assaut (avec détermination mais sans conviction car il n’imagine pas un succès) et ce qui devait arriver arriva, c’est l’échec, l’unité est partiellement décimée, doit retraiter à mi parcours, certaines compagnies ayant même évité de monter au front tant le feu ennemi était dense, etc … Conséquence : le général A qui veut faire un exemple et surtout sauver son honneur bafoué, décide de faire désigner trois hommes (il est soutenu dans cette démarche par le général B) qui seront jugés pour lâcheté devant l’ennemi et condamnés à mort
-La deuxième scène que je trouve importante, c’est au début de la seconde moitié du film, lorsque Dax, qui a assuré la défense des trois accusés au cours d’un simulacre de procès, s’est rendu compte que la cause était étendue et qu’ils devaient être condamnés pour l’exemple.
A partir de là, il va jouer une toute autre carte, plutôt que de continuer à vouloir démontrer l’injustice, il va décider d’utiliser le système hiérarchique en lui-même, pour mieux arriver à ses fins, il joue ainsi une partie d’échecs contre le général A, qu’il va accuser, témoignages écrits à l’appui, d’avoir voulu faire tirer sur ses hommes par l’artillerie du corps.
Il présente cette information au général B, d’une manière presque anodine. Celui-ci, bien évidemment comprend tout de suite la portée d’une telle accusation et se laisse finalement séduire par Dax, lequel lui suggère, pour sauver sa propre tête, de trouver un bouc émissaire de poids en la personne du général A.
A la fin de la scène, on ignore ce que va décider le général B, suspense …
-La troisième scène importante est la dernière du film, lors de laquelle le général B, qui veut désormais faire juger le général A pour lui faire porter le chapeau, réalise que Dax n’a pas agi pour évincer le général A et prendre sa place dans l’Etat major, mais bien par « idéalisme ».
C’est le fait même qu’il en soit surpris qui est étonnant, et qui démontre pour Kubrick qu’une majorité d’hommes sont prêts à tout pour éliminer leurs semblables et leur prendre la place, dès lors que l’opportunité s’en présente, et qu’il n’existerait en somme qu’une minorité (représentée par Dax, l’ « idéaliste »), à vouloir le faire pour des raisons tout simplement justes.
C’est donc un film, qui peut sembler assez pessimiste, mais qui en dit long sur l’âme humaine.
En tout cas un très bon film qu'on se doit d'avoir vu au moins une fois
Pour éviter d’alourdir ce post, je traiterai du second film à part