Et maintenant ce que j'ia écrit sur l'affaire de l'Aigle du 4e de ligne :
Le colonel Bigarré, du 4e de ligne, cherche à faire oublier les déconvenues de son régiment face aux cavaliers de la garde russe. Lui et ses hommes combattent avec une furie incroyable. Ils capturent ainsi le colonel Soulima du 8e de chasseurs et deux drapeaux. Bien que cela reste anecdotique, Bigarré ne sait pas encore à cet instant que son régiment a connu le déshonneur de perdre une Aigle. Ses hommes ont en effet ramassé, au cours des combats contre la cavalerie russe, une des deux Aigles du 24e léger, un moment abandonné au sol, et cela sans en vérifier la provenance. Le soir venu, il devra rendre l’Aigle du 24e et constater avec amertume la perte d’un des siens. La compensation que constitue la capture de trophées prestigieux aux abords d’Aujezd ne suffira pas alors à laver l’honneur de son régiment.
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Mais nous l’avons vu, un régiment français s’est également fait ravir son Aigle à Austerlitz. Il s’agit du 4e régiment d’infanterie de ligne dont les carrés ont été brisés par les cavaliers de la garde impériale russe. Lorsqu’il les passe en revue quelques jours après la bataille, Napoléon fait à ces braves soldats, dont une vingtaine de compagnons ont perdu la vie pour sauver sans succès le précieux emblème, des reproches à la hauteur du déshonneur encouru : « Où est votre Aigle ? Vous êtes le seul régiment de l’armée française à qui je peux faire cette question ! J’aimerais mieux avoir perdu mon bras gauche que d’avoir perdu une Aigle ! Elle va être portée en triomphe à Pétersbourg et, dans deux cents ans, les Russes la montreront en orgueil. Que ferez-vous pour réparer cette honte, pour faire taire vos vieux camarades de l’armée qui diront en vous voyant : Voilà le régiment qui a perdu son Aigle ? Il faut qu’à la première occasion, votre régiment m’apporte au moins quatre drapeaux ennemis, et alors je verrai si je dois lui rendre son Aigle. ». On mesure mieux, en comparant ces propos humiliants aux éloges dispensés dans le Bulletin de la Grande Armée, combien cette question des trophées est importante à l’époque. Le 4e de ligne échappera finalement à un trop long purgatoire. Napoléon au regard de la conduite héroïque du régiment à Austerlitz, et des drapeaux qu’il a lui-même enlevés à l’ennemi, lui remet une nouvelle Aigle le 25 décembre à Vienne.